Les auteurs de pin-ups des Comic Books, des années 30 jusqu’au code…

Publié le par Fred Tréglia

 

Dès la fin du 19e siècle, la pin-up perça sur de nombreux supports, tels les affiches publicitaires (en France avec Mucha, Toulouse-Lautrec...), les couvertures des magazines (aux USA celles d'Esquire signées George Petty, les Weird Tales de Margaret Brundage ou les Spicy Pulps), les calendriers (avec Alberto Vargas ou Gil Elvgren), ou le cinéma (King Kong faisant triompher Fay Wray en 1933 et la belle Jane Russell émoustillant l’Amérique de 1943, dans The Outlaw d’Howard Hughes). C’est donc tout naturellement que la pin-up trouva sa place dans les comic books naissant de la fin des années 30, suivant de près la jolie Dale Arden, complaisamment dévoilée dans les Sunday pages de Flash Gordon. Car le public était friand de "Cheesecake" en ces années de crise économique.

Quel point de vue donner à cet article ? Fallait-il opter pour les personnages et les séries, éditeur par éditeur ? Ou fallait-il suivre les auteurs de ces bandes exotiques ? Au risque de passer pour misogyne, c’est finalement cette direction que nous avons choisie, vu le caractère interchangeable des personnages…

C’est donc à la fin des années 30 que naquirent à New York les “ Sweatshops ”, studios rassemblant dans des conditions parfois exigües des jeunes dessinateurs sortant de l’école (souvent du Pratt Institute), afin de “ packager ” des comic books “ clé en main ” pour les éditeurs de pulps qui venaient de se lancer sur le nouveau marché du comic book. C’était le besoin qui créait l’organe, la nécessité de remplir les 64 pages syndicales avec autre chose que des rééditions de strips colorisés et de pages du dimanche qui avait conduit les éditeurs à s’associer à ces structures fragiles mais débrouillardes.

Le plus important d’entre tous fut le Sweatshop de Will Eisner et Jerry Iger (dont le grand Will parle dans son graphic novel : The Dreamer). Eisner et Iger embauchèrent de nombreux artistes, qui pour pas mal devinrent célèbres : Lou Fine, Bob Kane, Jack Kirby, Bob Powell, Nick Cardy, Bob Lubbers, Wallace Wood ou Matt Baker. Will Eisner regretta longtemps d’avoir éconduit deux petits jeunes venant de Cleveland (Ohio), dénommés Joe Shuster et Jerry Siegel, mais c'est une autre histoire… Autre Sweatshop ayant accouché de grands noms, Funnies Inc. de Lloyd Jacquet, avec Bill Everett, Carl Burgos ou Paul Gustavson et, pour quelques temps (avant qu’il ne se rendit compte qu’il gagnerait plus d'argent tout seul à aller démarcher les éditeurs), Joe Simon. C’est d’ailleurs ce qui arriva à ces ateliers - studios, les dessinateurs souvent exploités, finissant par travailler directement pour leurs anciens clients dès le milieu des années 40.  Quant au tout premier sweatshop, le Harry Chelser Shop, il donna leurs chances aux talentueux Jack Cole, avant qu'il n'aille chez Lev Gleason, et Charles Biro, plus tard dévoyé par la MLJ.

Mais revenons à l’industrie naissante des comic books et aux pin-ups…

C’est tout naturellement le Eisner et Iger Shop qui produisit en 1938 "Sheena, reine de la jungle", accessoirement la première pin-up des comic books, dans un magazine anglais intitulé Wags, et repris par l’éditeur Fiction House en 1939 sous le titre Jumbo Comics. Un genre en soi naissait, celui des reines de la jungle, qui allait faire tache d’huile dans les autres magazines de Fiction House (Jungle Comics, surtout) et chez la concurrence. Parmi les illustrateurs du studio ayant planché sur la tarzane (et Bob Reynolds, son compagnon - her mate dans la VO -, ce qui sous-entend tout ce que vous voudrez !), on pouvait admirer les talents de Mort Meskin,  Bob Powell, Artie Saaf, Nick Cardy… Pour Jungle Comics, Bob Lubbers (futur dessinateur du strip de Tarzan), réalisa  "Camillia" et son joli bikini en peau de zèbre (dès le n°1 de la revue). "Tiger Girl" de Matt Baker apparut dans Fight Comics # 32, avec son héroïne au slip en peau de… tigre, bien sûr ! Comme quoi, c'est souvent les sous-vêtements qui font la différence chez les femmes… Chez Fiction House, Eisner & Iger produisirent également d’autres séries à héroïnes sexy, déclinant la formule aux différents genres : Cardy réalisa "Mysta, Queen of Science" dans Planet Comics # 35, "Senorita Rio" dans Fight Comics #19). On peut également citer "Jane Martin" dans Wings Comics n°1 ou "Fire Hair, Flame Girl of the Wild West" dans Rangers Comics # 21.

Le Harry Chelser Shop réalisa des séries pour les magazines Zip Comics et Pep Comics de l'éditeur MLJ. "Madame Satan" de Harry Lucey sortit dans le n° 16 de Pep Comics (1941), série remplacée par “ Archie ” (avec Betty et Veronica) de Bob Montana à partir du n°22. Charles Biro devait finalement quitter le Harry Chelser Studio pour devenir éditeur chez MLJ. 

La concurrence entre les Sweatshops était grande… Le Eisner & Iger shop ne se contentant pas de Fiction House, démarcha aussi Quality où ils produisirent en 1941 la célèbre "Phantom Lady" (la première incarnation du personnage, dessinée par Arthur Peddy) dans Police Comics n°1.  Ils obtinrent également le marché des magazines de Fox Publishing, assistés de quelques dissidents de la MLJ. Là, Lou Fine dessina "The Flame & Flame Girl" dans Wonderworld Comics n°30. Harry Lucey réalisa "The Sorcerer of Zoom" dans Weird Comics n°1. Eisner contribuera également au retour du personnage de "Phantom Lady" chez cet éditeur, dans la version Matt Baker, plus sexy, que nous publions dans Golden Titans (info que vous savez déjà, si vous avez lu les articles du n°1 paru en juin), sans oublier les "South Sea Girls" de Seven Seas, "Rulah" de Zoot Comics et Zegra (dont l'histoire "Phara" paraît dans Golden Comics n°2)… 

Quant au studio de Lloyd Jacquet, il vendit ses productions à Timely, l'ex éditeur de pulp Western Fiction Publishing (aussi connu sous la banière Red Circle). On y trouvait notamment Miss Fury, héroïne masquée tendance cuir, de Tarpe Mills, avant que l’éditeur Martin Goodman ne remercia son prestataire en lui piquant ses meilleurs talents (Everett et Burgos, notamment) et ne confia le rôle de directeurs artistiques de ses publications à Simon & Kirby (déjà free lancers) en 1941.

Jacquet travailla ensuite pour Lev Gleason, où œuvrait alors l'éditeur Charles Biro, collaborant à Daredevil (un héros souvent confronté à des situations "bondage"), à Crime Doesn’t Pay et ses filles de mauvaise vie très réalistes, et au Boy Comics (qui, comme son nom ne l’indique pas, avait des pin-ups à qui veut, pour occuper les garçons du titre !). 

Jacquet encore, travailla pour Hillman, avec Biro en sous-main. Dans Air Fighter n°7 (Vol.2), apparaissait le personnage de Valkyrie (dans la série "Air Boy", dessinée par Fred Kida), méchante qui en faisait voir de toutes les couleurs (dans tous les sens du terme) au héros aviateur.

Toujours pour Air Fighter, le Iger Shop (après le départ d'Eisner pour réaliser le "Spirit") livra quant à lui le personnage de "Black Angel" à partir du n°2 de la revue. Très porté sur l’anatomie féminine, le dessin de John Cassone (malheureusement mort à la guerre) fit sensation chez les teen-agers boutonneux. La série eut même droit à une réédition chez Verotik en 1996. 

 

Au milieu des années 40, les Sweatshops se disloquèrent et les artistes passèrent en contrats à la planche (le fameux "Work for Hire") chez les éditeurs. 

Harvey publia "Black Cat" dans Pocket Comics n°1 (1941), dessiné par Al Gabriel, puis Lee Elias, d’après l’actrice Linda Turner.





















Chez Quality, Jim Mooney fit monter la température avec "Wildfire" dans Smash Comics n°25. Habillée de ses seules flammes, le personnage très "Hot" préfigurait déjà "Vampirella". Toujours chez Quality, une révolution survint en 1946, avec l'apparition de "Torchy" de Bill Ward. Apparue dans Modern Comics n°53, la jolie blonde en bas et porte jarretelle eut son titre en 1949 et fit furieusement monter l'érectomètre chez toute une génération de lecteurs.

 

Chez Standard, les dissidents du Studio Iger faisaient également de la pin-up, avec "Princess Pantha" dans Thrilling Comics n°56 (dessins de Artie Saaf), à lire aussi dans Golden Comics n°2, et "Judy of the Jungle" de Ralph Mayo et Artie Saaf (parfois assisté du jeune Frank Frazetta) dans Exciting Comics # 55.

Bob Powell poursuivait sa carrière solo sur "Blonde Bomber" dans Green Hornet Comics n°7 (Harvey, 1942) et sur Cave Girl chez Sullivan.

En 1953-54, Frazetta et Powell contribuèrent à tour de rôle au personnage titre Thun’da, publié chez Magazine Enterprises et incluant une ravissante jungle girl dénommée Pha, lui valant sa présence dans cet article (les Thun’da de Frazetta furent publiés en France en un volume en 1983 dans la formidable collection Xanadu des Humanoïdes Associés)..

Suite au succès de Tarzan, Nyoka, une autre héroïne de Burroughs, fut adaptée chez Fawcett par Harry Anderson (d’abord dans Master Comics n°50, puis dans son propre titre). Rien de très excitant pourtant  dans cette fille de la jungle en bermuda. 

Toujours dans les années 50, Atlas-Mavel produisit également des reines de la jungle, avec "Leopard Girl" dans Jungle Action, "Jann of the Jungle (Jungle Tales), avant de se réessayer aux super-héros (et aux super-héroïnes qui nous intéressent ici), telles "Blonde Phantom" (dans All Select n°11, puis en back-up de Sub-Mariner et dans sa propre série, avec Syd Shores au dessin), "Venus" du génial Bill Everett en 1951 et quelques autres plus anecdotiques ("Namora", la cousine de Submariner ou "Sun Girl"). Mais l’autre événement marquant des comic books tendance "Good Girl Art" de l'époque préCode (en plus de "Torchy", pour ceux qui se seraient endormis) demeure la reprise de "Phantom Lady" par Matt Baker chez Fox Publishing, mais ceci, vous le savez déjà...

Avant de clôturer ce petit panorama non exhaustif des auteurs de pin-up, il convient de citer Jack Kirby et ses Romance books, notamment l'histoire "The Girl Who Tempted Me" (si je vous le dis !) parue dans Young Romance n°17 et de ne pas oublier les maîtres de EC Comics, les géniaux Wallace Wood et Jack Kamen, transcendant les histoires déjà passionnantes de Crime Suspenstories, par les formes généreuses et l’élégance de leurs personnages féminins...

Toute cette floraison de jolies filles allait pourtant disparaître en 1954, avec l’arrivée du Comics Code Authority. Dans sa section “ costume ”, le code d'autocensure de la profession précisait :

- la nudité est interdite sous quelque forme que se soit, tout comme l’indécence et l’exhibitionnisme.

- les poses suggestives sont inacceptables.

- les personnages doivent avoir des tenues acceptables en société.

- il ne doit pas y avoir d’exagération des qualités physiques féminines.

Tout était dit… Et il faudra attendre la révolution Underground de la fin des années 60 pour bousculer à nouveau Dame Censure…

 

 

 

Jean Depelley et Fred Tréglia  
  Retrouvez donc ces Pin-Up dans Golden Comics N°2
Sortie début Juillet de Golden Comics n°2 Weird Pin-Up Tales  Dés à présent en souscription pour 7.5€ !(Port inclus) Ou par abonnement :
http://fredcomics.over-blog.com/pages/Le_Catalogue_Univers_Comics_Unlimited-1017262.html


Coup de Coeur !

Si ce comics ne vas pas changer la face du monde c'est tout de même un grand bol d'air frais qui mérite que l'on si intéresse et ceux pour deux raison :
- Il se lit trés bien et préfigure un vrai travail par les auteurs
- Il est pas chère du tout !!!
Un défaut ? Il manque un peu de consistance...
Je vous parle bien sur de L.S.A.  le premier comics de Merluche Comics

Tous les renseignements sur : http://www.merluche.com

Publié dans Golden Comics

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article